Emma Bovary revisitée par Philippe Doumenc

Si comme moi vous aviez laissé passé l’an dernier cette charmante Contre-enquête sur la mort d’Emma Bovary,* n’hésitez pas un seul instant à vous y jeter. Que voilà de la belle langue, pour des suggestions au demeurant bien hardies !

Imaginer la réalité d’une Emma à Yonville, en un printemps normand anormalement neigeux et victime d’un assassinat qui n’avait, au fond même pas lieu d’être, voilà bien une belle trouvaille. Philippe Doumenc nous renvoie dans le décor et la vie remodelés des personnages de Flaubert à la suite d’un jeune inspecteur plein d’entrain et d’émois à la recherche d’une vérité… qui se confirme dans l’oeuvre de Gustave.

Mais on sent chez l’auteur un tel plaisir à cisailler le détail d’une oeuvre qu’il connaît à l’évidence par coeur, réinventant ici ou là quelques traits, chargeant quelque peu, mais avec la grâce du langage, des caractères déjà passablement médiocres, cupides, lubriques ou obséquieux, que c’est aussi pour le lecteur un réel plaisir de suivre ce Rémi, émule de Rouletabille. Au gré de toutes ses hypothèses et interrogations, entre le roman vrai et un possible et dérisoire imaginaire, il nous fait passer un délicieux moment.

Une occasion, aussi, de revenir à l’oeuvre initiale, celle de toute une vie, où de découvrir, autre bijou ce Quelque chose à déclarer **de Julien Barnes, autre fin connaisseur de Gustave Flaubert et amoureux indéfectible de la France, et surtout de l’esprit français, dont Philippe Doumenc témoigne ici une fois encore.

*Actes sud, 2007

** Folio

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